19 mai 2025 par Richard Soubielle
L’art d’une fin de semaine réussie à Madrid
À peine descendu de l'avion, l'air vibrant de Madrid vous enveloppe déjà. Direction le cœur de la ville, près de la Puerta del Sol. Loin des chaînes hôtelières impersonnelles, j'avais déniché une charmante « pensión » dans une ruelle pavée. Les murs épais gardaient une fraîcheur bienvenue et le balconnet offrait une vue discrète sur l'animation de la rue.
Je n’ai pas pu résister bien longtemps à la gourmandise d’un déjeuner « à l’espagnole » et pour cela et bien d’autres choses encore, vu l’heure, rien de mieux que le Mercado de San Miguel.
Les nombreux étals de produits ibériques sont un plaisir pour les yeux et un régal olfactif. Mais ce midi on sacrifiera au rituel, certes simple mais tellement emblématique pour moi de l’Espagne continentale : une belle assiette de jambon et fromage avec une bière bien fraîche. Là comme ailleurs, le diable est dans le détail c’est bien connu. Donc sans hésiter ce sera du jamón ibérico de bellota tranché sur place en fines lamelles qui fondent dans la bouche, accompagnées de tranches de fromage de brebis appelé Manchego affiné à point, juste sec mais magnifiquement goûteux.
Pourquoi la bière, me direz-vous, alors que l’Espagne produit d’excellents vins ? Et bien, tout simplement pour le plaisir de prononcer le nom de cette boisson servie dans un verre à eau de petit volume, une blonde à la pression, légère, rafraichissante, « una caña » Ça s’est fait !
En route pour les premières découvertes !
L’après-midi étant avancée un tour au musée de la Reina Sofia pour voir « en vrai » la grande peinture monochrome de Picasso « Guernica » juste avant la fermeture pour éviter la foule, c’est parfait.
Pour ma première soirée, pas question de tomber dans les pièges à touristes ! Grâce aux conseils d'un ami madrilène, je me suis aventuré dans le quartier de La Latina. C'est là que j'ai découvert Casa Revuelta. Derrière une devanture discrète se cache une véritable institution ! L'ambiance y est bruyante et conviviale, on se côtoie, au coude à coude à la barra (le bar), pour déguster leurs fameux tapas dont les bouchées de morue frite croustillantes. Un verre de tinto de verano bien frais et la soirée madrilène peut commencer !
La commande se fait souvent à la volée, en interpellant les serveurs affairés. Il faut un peu de culot, mais ça fait partie du charme !
Deuxième jour : L'art, la passion et les trésors cachés.
Nous dédions notre matinée à la majesté du Museo del Prado. Le temple de Vélasquez, mais pas que ! Prévoyez du temps, car la richesse des collections est impressionnante. Se perdre devant "Les Ménines" ou les œuvres de Goya est une expérience inoubliable. Un petit conseil : arrivez dès l'ouverture et achetez vos billets avant pour éviter la foule et une longue file (si vous êtes senior, vous aurez également ce privilège).
Concentrez-vous sur les périodes ou les artistes qui vous intéressent le plus. Pour ma part j’ai été particulièrement captivé par la force expressive des portraits de Goya et une découverte plus intime de Murillo.
En fin de matinée, nous revenons à pied vers la place du Callao en passant par la fontaine de Cybèle et la Gran Via et ses immeubles Belle Époque. Au Callao, j’utilise une astuce connue de quelques habitués de la destination. Nous montons à la terrasse du Corte Inglés pour siroter une sangria et jouir d’une belle vue sur les toits de la capitale en se repérant pour la balade de l’après-midi.
Descente vers le Palais Royal via La Puerta del Sol et la Plaza Mayor avec leurs célèbres « spots » où une photo s’impose. Un crochet rue des Bordadores pour déguster quelques spécialités Asturiennes et boire un peu de cidre au Ñeru (réserver) et nous poursuivons notre visite historique car nous sommes devant le Palais Royal. Là aussi, il faudra choisir ses salles et ses thèmes car il est immense.
Au sortir, si on a de la chance on pourra s’arrêter à la cathédrale Sainte Marie de la Almudena, si elle est encore ouverte !
Mais, cerise sur le gâteau, j’ai préparé une surprise à mon épouse car je souhaite terminer cette journée éminemment culturelle en apothéose par une soirée au Corral de la Morería (Calle de la Morería).
Ce tablao flamenco est l'un des plus anciens et des plus réputés de Madrid. L'atmosphère y est intime et chargée d'histoire. Les artistes, avec leur passion et leur virtuosité, vous transportent dans un autre monde. Les chants aux accents déchirants, les claquements de mains secs (palma) rythment les mouvements gracieux des danseurs et accompagnent la complexité du jeu de la guitare (compás) tout ceci avec une intensité rare. Rien que de l’évoquer, j’en ai eu la chair de poule !
Un conseil : réservez à l'avance, car les places sont limitées. Et pour une immersion totale, faites comme nous, optez pour le dîner sur place, ce n’est pas donné mais la cuisine traditionnelle espagnole y est excellente.
Troisième journée : Brocante et saveurs locales.
Le dimanche matin à Madrid, c'est jour de Rastro ! Ce marché aux puces géant s'étend sur plusieurs rues du quartier de La Latina. On y trouve de tout : des antiquités aux vêtements vintage, en passant par des objets insolites et des bibelots kitsch. C'est un véritable labyrinthe où il fait bon se perdre et chiner et c’est ce que l’on fait avec beaucoup de plaisir jusqu’à l’heure du déjeuner. Dans cette foule très dense, on fait gaffe à nos affaires, question de prudence.
Si vous comprenez l’espagnol, le plaisir sera doublé par la compréhension de cris des marchands qui vantent leurs produits avec des slogans hauts en couleur !
Pour le déjeuner, après l’ambiance bruyante des « puces madrilènes » j'ai opté pour la Bodega de la Ardosa à rejoindre en métro. Cette taverne centenaire a conservé son charme d'antan avec ses murs carrelés et ses tonneaux de vin. J'y ai dégusté de délicieuses « croquetas caseras » (croquettes maison) et l’incontournable « tortilla española » savoureuse, le tout accompagné d'un verre de vermouth local. L'ambiance y est chaleureuse et familiale, on se sent tout de suite comme un habitué.
On redescend vers la Grand Via et on occupe le reste de la journée à faire du shopping. Pour terminer ce court séjour, rebelote comme pour le début de notre week-end un dîner autour du jamón de bellota au Museo del Jamon, rue San Geronimo à deux pas de la Puerta del Sol s’impose et en plus dans le plus pour style madrilène soit « a tapear » c’est à dire debout « a la barra » What else ! comme dirait l’autre. Faites-vous plaisir commandez un verre de Rioja ou un Ribera del Duero, deux crus qui accompagnent à merveille le jamón ibérico de bellota mais aussi un Sherry sec (Fino ou Manzanilla) ce qui est également un excellent choix.
Demain matin, nous quitterons Madrid et, à nouveau j’en suis sûr, nous apprécierons ce court séjour décontracté, bien dense intellectuellement mais tellement attachant grâce à cet art de vivre des espagnols qui détend l’atmosphère et rend particulièrement agréable cette escapade ibérique.